2084, La Fin du Monde, de Boualem Sansal
Publié le 27 Novembre 2015
A quand la Fin du Monde ?
Se souviendra-t-on éternellement des siècles d'Histoire, de découvertes et de guerres qui nous précèdent ? Ou bien assistera-t-on, un beau jour, à l'écroulement de cette civilisation, à l'avènement d'un Ordre Nouveau et à la Fin du Monde ?
L'Abistan est un immense empire déchiré par une multitude de Guerres Saintes, sans frontière, dont les soixante provinces s'étendent sur toute la planète ; il tire son nom d'Abi, Délégué sur Terre du Très-Haut Yölah -gloire à lui-, et prophète du Gkabul, religion universelle qui se base sur la foi, la soumission et l'acceptation aveugles de ses croyants. A Qodsabad, la capitale, tout le monde vit dans la méfiance de l'autre et dans l'espoir d'une existence idéale dans l'au-delà ; les hérétiques sont dénoncés par leurs voisins, arrêtés, puis jetés dans un stade et battus à mort. Après un séjour d'une année dans un sanatorium coupé du monde, Ati, habitant de la capitale, se questionne sur le Système : Qui est-il ? D'où vient le Gkabul ? Et que signifie cette date, 2084, marquant la fin et le début de tout ? A ces questions s'ajoute la rencontre de Nas, un archéologue condamné par le Système pour avoir découvert les vestiges d'un ancien monde, plus ancien encore que l'avènement d'Abi sur Terre...
Voilà un récit profond, intelligent et poignant sur l'hypocrisie et le danger d'une potentielle dictature religieuse ; la précision de la psychologie d'Ati nous transporte dans l'ambiance froide, écrasante, étouffante d'un monde régi par la Pensée Unique. On se questionne avec le héros, on cherche des réponses, et l'on se prend de pitié pour ce peuple sans souvenirs, sans saveurs, divisé par la couleur des vêtements, où chacun vit dans le confort de son petit quartier, noyé dans l'immensité du pays dont la Frontière est une légende urbaine... Et puis l'on imagine un monde pareil, où la parole d'un prophète pourrait faire basculer la population entière dans l'ignorance, la peur, l'obéissance à une croyance supérieure, au sacrifice de la liberté et de la pluralité des pensées...
Fort heureusement, cela n'est pas près d'arriver. Comme l'écrit l'auteur : « Dormez tranquilles, bonnes gens, tout est parfaitement faux et le reste est sous contrôle. »
Malo, 1èreS 2