D'après une histoire vraie, Delphine De Vigan
Publié le 25 Novembre 2015
Pour de Vrai
« Mais qu'est ce qu'on peut écrire après ça ? ». C'est la question que Delphine et ses lecteurs se posent. Après la parution de son quatrième roman, Rien ne s'oppose à la nuit, dans lequel l'auteur évoquait le suicide d'une mère bipolaire, un roman autobiographique qui avait pour seule couverture une photographie de sa mère, la narratrice s'épuise à enchaîner les parutions médiatiques. Elle se retrouve désœuvrée, noyée parce qu'elle a écrit un livre dont elle « n'avait pas imaginé la portée. Un livre dont l’effet au sein de [sa] famille et autour [d'elle] se prolongerait longtemps ». Un livre qui lui vaut même de recevoir des lettres de menace. Et lorsqu'elle décide de se remettre au travail, c'est le vide, le néant ou plutôt la page blanche. Impossible d’écrire la moindre ébauche, la moindre phrase, puis ensuite, l'idée même de se retrouver devant le clavier la tétanise au point de vomir. Tenir un crayon se révèle impossible. « Écrire, je ne pouvais plus. Écrire, c'était non. »
Elle est fatiguée, abattue. Et puis elle rencontre L. au cours d'une soirée chez l'amie de son amie. S'en suit alors une relation des plus déroutantes. L. s'est insidieusement glissée dans sa vie, au point d'en prendre le contrôle sans pour autant que Delphine ne l'en empêche. S'en est elle-même rendu compte ? « Encore aujourd'hui, il m'est difficile d'expliquer comment notre relation s'est développée si rapidement, et de quelle manière L. a pu, en l'espace de quelques mois, occuper une telle place dans ma vie. L. exerçait sur moi une véritable fascination. L. m'étonnait, m'amusait, m'intriguait. M'intimidait ». Mais entre L. et elle, on se demande petit à petit qui mène vraiment le jeu des faux-semblants... « Ce livre est le récit de ma rencontre avec L. L. est le cauchemar de tout écrivain. Ou plutôt le genre de personne qu’un écrivain ne devrait jamais croiser. »
Notre société est fascinée par le Vrai. Le Vrai à la télé, le Vrai au cinéma, le Vrai dans l'écriture... Tout au long du roman la même question nous revient, est ce que c'est vrai ? Cette fois-ci, le lecteur se retrouve au cœur d’une étrange manipulation. Avec ce thriller psychologique et cette vertigineuse réflexion sur l'obsession actuelle de l'édition ou du cinéma pour les histoires inspirées de « faits réels » Delphine De Vigan réussit à nous captiver de bout en bout.
La limite entre le réel et la fiction reste floue jusqu'à la fin et même au-delà. La frontière est assez ténue entre ce qui est normal et ce qui ne l'est pas. On s’inquiète, on se méfie, on appréhende jusqu'au bout. On se laisse convaincre, car c'est ce que l'on recherche, "une histoire vraie".
Perrine 1S2