Rencontre avec Albane Gellé par Marie, 1ES2
Publié le 4 Mai 2014
Le jeudi 20 février 2014, nous avons rencontré la poète Albane Gellé, dans le cadre d'une découverte de la poésie contemporaine. Les élèves de 1ES2 et 1L, un membre de la Maison de la poésie de Rennes, les documentalistes et deux professeurs de français étaient aussi présents. Durant son intervention de deux heures, l'auteure a répondu à des questions, préparées en classe, et posées de façon aléatoire comme lors d'une conversation.
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Albane Gellé nous a confié qu'elle écrit « depuis toujours », et qu'elle a commencé par la poésie en vers, plus conventionnelle. Sur certains sites Internet, elle parle d'une « blessure du langage », expression signifiant qu'elle était une enfant réservée et mal à l'aise en public. La poésie a « réparé » ce rapport à la langue, et lui a permis de s'exprimer librement. Plus concrètement, avant de devenir poète, Albane Gellé a fait des études de Lettres, durant lesquelles elle a découvert de nouveaux poètes et des éditeurs. Après cela, elle a travaillé comme enseignante remplaçante pour finalement décider de se consacrer entièrement à l'écriture poétique. Elle répartit son temps entre les moments où elle écrit, et les temps de rencontres, par exemple dans les écoles, les maisons de retraite ou encore dans les prisons. L'auteure écrit la plupart du temps chez elle, s'inspirant de ce qui est autour d'elle, de ce qu'elle voit ou entend, de choses intimes comme de sujets d'actualité. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, elle ne qualifie pas son écriture d'« écriture automatique ». Elle laisse venir ses idées, mais veille tout de même à faire un travail sur la langue et fait l'effort de construire ses poèmes (même si elle en perd parfois le fil). On ne peut cependant pas la rattacher à un courant littéraire, puisqu'elle se sent elle-même «entre deux». Enfin, Albane Gellé a fait de la poésie son métier, mais c'est avant tout quelque chose de nécessaire, qui doit faire partie de sa vie.
Ensuite, Albane Gellé nous a fait part de sa vision de la poésie. Elle avoue ne jamais pouvoir s'en détacher, car c'est une richesse, un rapport qu'elle entretient avec le monde. De son point de vue, la poésie offre la liberté de tisser les mots et de manipuler le langage comme elle se sent. Elle a d'ailleurs ajouté que la poésie souffrait de clichés et a cité l'exemple des poémes en vers qu'on apprenait à l'école primaire. Selon l'auteure, la poésie doit être reliée au réel, à la vie et ne doit pas être « systématique ».
Enfin, la poète nous a éclairés sur son recueil de poèmes Si je suis de ce monde, en commençant par expliquer l'origine du titre. Dans le cadre de l'exposition « Tenir debout » au musée des Beaux-Arts de Valenciennes, on lui a demandé d'écrire autour de deux mots : "tenir debout". Il s'agissait donc d'une sorte de commande, mais cela lui a finalement donné envie d'écrire d'autres poèmes. Elle avait en tête, depuis plusieurs années, l'expression « Si je suis de ce monde », et a trouvé qu'elle conviendrait parfaitement comme titre à son nouveau recueil : il faut bien tenir debout, malgré un monde qui n'est pas toujours rose,explique-t-elle. Si l'on s'intéresse maintenant au contenu du recueil, on peut s'interroger sur la grammaire désordonnée de tous les poèmes. Albane Gellé explique que l'absence de ponctuation n'était pas un choix de départ, mais au fur et à mesure qu'elle écrivait, elle a trouvé que ses poèmes « respiraient » mieux ainsi. Par ailleurs, le poème de quatrième de couverture est un choix de son éditeur, mais il s'agit de l'un des poèmes préférés de la poète. Les poèmes qu'elle aime le plus sont ceux qu'elle est en train d'écrire, parce qu'elle s'en sent plus proche. Elle écrit en fonction de son état d'esprit du moment, mais une fois qu'ils ont été publiés, ils ne lui appartiennent plus. Le choix de l'ordre des poèmes est l'étape finale. Albane Gellé a sa façon à elle de procéder : elle éparpille tous les poèmes sur le sol d'une grande pièce vide, et construit le recueil comme un « chemin ». Elle préfère d'ailleurs appeler son recueil un livre, puisqu'il possède un début et une fin.
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J'ai trouvé cette rencontre très intéressante, d'abord parce qu'on pouvait échanger librement avec la poète, et qu'elle répondait spontanément. Elle est arrivée sans notes, sans discours préparé et a répondu en toute sincérité à nos questions. Elle nous a dévoilé sa vision de la poésie, nous a fait découvrir sa passion et pourquoi elle a fait de la poésie son métier. Par ailleurs, en classe nous étudions uniquement des poètes disparus, dont on peut contester le sens des textes puisqu'ils ne sont pas là pour nous éclairer. Le fait d'échanger avec une poète de son vivant, capable de nous expliquer elle-même ce qu'elle a voulu dire était donc très enrichissant.