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Publié le 17 Mai 2013

 

Sujet : Avant d'embarquer pour l'Afrique, Salvatore Piracci écrit une lettre à sa femme pour lui expliquer les raisons qui le poussent à tout quitter et ce qu'il espère trouver de l'autre côté de la Méditerranée.

 

 

 

22 Octobre 2006.

Lampedusa.


     Vingt-trois heures trente et une. Dans deux heures à peine, je serai sur un bateau, voguant sur cette mer qui m'a dévoilé tant d'horreurs depuis que je la côtoie, cette mer capricieuse qui choisit de tuer ou de chérir. Vingt-trois heures trente deux. L'aiguille fine de l'horloge qui tremble à chaque seconde me donne un certain avant-goût du mal de mer à venir.

     Vingt-trois heures trente trois... Je pense toujours au mal de mer. Curieuse expression, n'est ce pas ? Trop de touristes aux airs effarés l'emploient avec une banalité qui m'insupporte. Moi, je peux sentir le vrai mal de mer, celui qui colle à la peau, qui s'incruste dans les esprits et continue de les hanter longtemps après avoir posé le pied à terre. La mer me fait mal. La mer, après m'avoir pris dans ses bras comme la mère que je n'ai jamais eue pendant vingt ans, me procure maintenant un profond dégoût. Ma mère me rejette. Ou plutôt, c'est moi qui la renie.

 

     Vingt-trois heures trente cinq. Pendant vingt ans, j'ai fait ce qu'on attendait de moi, trahissant les propres frères. Pendant vingt ans, j'ai représenté l'échec, la déception, la malchance. Pendant vingt ans, j'ai été l'esclave de l'inhumanité.

     Vingt-trois heures trente sept. Et puis il y a eu ce regard. Ce regard qui a tout changé. Ce regard qui a remis en cause toute mon existence. Ce regard qui, après toutes les horreurs dont il avait été le témoin, semblait tout de même bien plus vivant que le mien. C'est cette femme, celle qui m'a regardé droit dans les yeux, droite et décidée, qui m'a réveillé. C'est dans les yeux de cette immigrée que j'ai retrouvé cette petite, minuscule flamme d'espoir, en tous points la même que celle que je percevais autrefois dans ton regard.

     Vingt-trois heures trente neuf. Depuis cette rencontre, je n'ai plus été tranquille, ne serait-ce qu'un instant. Encore maintenant, lorsque mes paupières se ferment, je les revois, recroquevillés dans une barque minuscule, à la merci des caprices de la mer. Et je le revois surtout lui, cet homme que j'ai refusé d'aider. Ce frère. Qu'avait-il fait ? Que m'avait-il pris ? Rien. Et pourtant je lui ai tout enlevé.

 

     Minuit.

     Alors voilà. Voilà pourquoi je veux partir. Voilà les raisons qui me poussent à quitter cette vie qui me dégoûte. Je ne suis pas triste. Je ne suis pas inquiet. Au contraire, plus l'heure de mon départ approche, plus je me sens en paix. Plus l'heure de mon départ approche et plus je m'éloigne du Commandant Piracci. Les derniers morceaux de ma carte d'« identité » se consument dans la cheminée. Je l'ai brûlée. J'ai renoncé à mon nom. Désormais, je ne suis plus personne. Mais, j'en suis satisfait. Il faut que tu comprennes que c'est cela que je pars chercher en Afrique. Une nouvelle naissance. Un recommencement.

     Minuit-une. Avec cette nouvelle journée commence la vie que j'aurais toujours dû avoir. J'ignore tout ce qu'il va m'arriver là-bas, mais j'ai le sentiment que j'ai toujours vécu pour arriver à cela. J'ai appris que mon nom signifiait « Le Sauveur ». Je pars chercher ce que je pourrais sauver. Ou bien peut-être que je fuis pour me sauver moi-même. En tout cas, je t'écris cette lettre car tu es le seul souvenir italien que j'emporterai avec moi en Afrique. Et je veux que tu saches que je suis apaisé.

     Minuit-deux. Mon crayon n'a plus d'encre. Cela est peut-être le signe que je n'ai plus rien à faire ici. En mettant un point à cette lettre, je mets un point final à mon histoire ici. Je te souhaite de vivre heureuse, car je sais que tu le mérites. Je te souhaite de vivre dans la tranquillité, car j'ai trop souvent été le témoin que la vie ne tient à pas grand chose.

 

Adieu.

 

Salvatore.

 

 

                                                                                                Alexandra P.

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Publié le 23 Avril 2013

Écriture d'invention : Avant d'embarquer pour l'Afrique, Salvatore Piracci écrit une lettre à son ex-femme pour lui expliquer les raisons qui le poussent à tout quitter et ce qu'il espère trouver de l'autre côté de la Méditerranée. Écrivez cette lettre.
 
Dans la pièce froide, les rideaux sont tirés, la cheminée éteinte. Sur les pierres grises au milieu des cendres se consument lentement sous une fumée épaisse les derniers mots.
«                                                                                      Lundi 27 Décembre 2006, Catane.
                       Chère Anna,
 
                                          Déjà tant de temps s'est écoulé depuis ton départ. Ton absence m'a plongé dans un néant d'incertitudes.
Je m'en souviens. Tu t'es d'abord éloignée, puis m'as ignoré. Je t'ai croisé lors de ma première escale à Gênes, je n'ai pas osé t'aborder. Je sais maintenant que tu m'as oublié, tu es partie depuis trop longtemps.
 
Mais aujourd'hui je pars, Anna. Je quitterai la ville dans la nuit, sans me retourner. Seuls les bruits de mes pas déterminés résonneront dans les ruelles encore éclairées. Je ferai sans regrets mes adieux à cette ville endormie qui m'a emprisonné pendant ce temps anéantit. Je monterai alors à bord du Zephiro et laisserai sur la mer déchaînée mon identité, au rythme incessant du roulement des vagues. Les flots avaleront mon nom, ce nom qui m'a si longtemps collé à la peau, qui décidait à ma place qui j'étais et résumait mon existence. Mon souffle sera pétrifié en une fumée glacée dans la nuit claire.
 
Je ne veux plus être le visage affligeant de l'Europe, mais celui de l'honnêteté et de la dignité des hommes. J'envie les regards brillants de volonté de ceux qui tentent par tous les moyens de passer, Anna. Cet espoir, il n'en existe pas de plus forts.
 
Ne te fais pas de soucis pour moi. Dans quelques heures, je ne serai qu'un homme de plus sur la route de l'Eldorado. Et alors je serai libre.
 
Salvatore       »
 
Le jour se lève. Les rainures fines des volets clos laissent passer les rayons dorés. Dans la cheminée, les cendres ont été ramassées. Il ne reste plus rien.
Charlotte 1èreL.

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Publié le 19 Avril 2013

Mardi 2 aout 2006,

 

Ce soir, les hirondelles ont disparu. Les boulevards ont été désertés et le vacarme des klaxons n'est plus qu'un lointain et douloureux souvenir. Je gare la voiture sur la place de l'indépendance. Je suis entré dans notre café, celui où je venais tous les jours. Faycal lève la tête, son regard est vide. En me voyant, il acquiesce un petit sourire triste, puis baisse la tête. Les dès sont dans sa main, il les regarde. Je choisis une des tables qui donnent sur la terrasse comme à mon habitude, comme à notre habitude. Je reste dans la pénombre du café. Les orangers sont toujours présents sur la place, je les contemple une dernière fois. Je bois mon thé. Je déguste chaque goutte avec une lenteur mesurée. Je pose de l'argent sur la table. Je lance un dernier coup d’œil à l'assemblée puis m'en vais. Mon regard en dit long sur mes pensées. Ils comprennent. J'ai peur. Peur de la maladie, de la souffrance, du noir, de la solitude, de la mort, mais j'ai surtout peur pour mon frère. Où est-il aujourd'hui ? A t-il traversé la Libye ? La Tunisie ? L’Algérie ? Il me manque. Terriblement. Je repense à tous ces moments de bonheur partagé. J'ai envie de crier de douleur mais rien ne sort. Je suis trop faible. Je suis malade. Malade de savoir mon frère loin de moi, de ne plus pouvoir sourire, de ne plus avoir aucun rêve, malade tout court. Ça me détruit, je suis maigre. Je suis épuisé. Plus personne ne veut m'approcher, je suis seul. Je ne vis plus, je suis mort à l'intérieur. Je me dirige vers la voiture. Une fois assis au volant, je pleure. Je pleure toutes les larmes de mon corps. Je décide de faire un dernier tour de la ville. Tout est si différent depuis que mon frère est parti. Tout semble vide, sans sens, sans gaité. Je contourne les jardins de la grande avenue. Je m'arrête devant une épicerie. J'achète des dattes, ce goût la va me manquer. Je les déguste une par une, je prends mon temps. Je regarde la ville tout autour de moi. Les voitures. Les arbres. Les passants. Qu'est ce que je vais devenir, qu'est ce que Soleiman va devenir ? Plus frères que jamais. A tout jamais. Je ne vieillirai pas avec lui, j'en deviens fou. «je ne veux pas te perdre», telles sont ses paroles. Il va me perdre. Mais je serai dans son coeur pour toujours. Je veillerai sur lui d'en haut. Je dois m'en aller vers mon Eldorado. Je dois abréger ma souffrance. Il comprendra. J'ai peur, j'ai froid, j'ai mal, je meurs. C'est fini. 

 

 

 

Faycal replia ce bout de papier. Il en était tout bouleversé. Il avait trouvé cette page de journal près d'un oranger, ceux que Jamal aimait tant. Cet homme, son ami avait quitté ce monde et avait laissé son rêve pour d'autres. Il savait que Jamal veillait sur son frère Soleiman, sur les clandestins et sur ceux qui rêvaient d'Europe. Faycal se rappelait du bon vieux temps où Jamal et son frère se rendaient dans son café, où leurs yeux brillaient d'espoir. Ils lui manquaient. Mais cette époque était révolue.

 

 

Julie 1ère L 

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Publié le 19 Avril 2013

 

Ceuta, 13 octobre 2005

 

Je suis de nuit, ce soir. Mes compagnons et moi sommes recroquevillés dans l'abri du poste tant l'air dehors est glacial. Je ne sais pas si c'est le froid ou le vent qui engourdissent les feuillages mais tout est terriblement calme. Nous jouons aux cartes en fumant du vieux tabac payé moitié prix sur le marché. Je me prépare à passer une longue nuit à attendre. Attendre qu'un autre bateau clandestin ne sonne l'alarme et nous fasse affronter ce froid mordant.

 

L'horloge vient de sonner trois heures lorsque c'est le moment pour certains de prendre quelques heures de repos. Le camion avec de nouveaux hommes, tous reposés et en forme arrive. Je mets mon gros manteau et suit les autres à l'extérieur, délaissant les cartes éparpillées sur la table et nos cigarettes qui se consument. Je suis étonné par tant de calme, même la mer semble pétrifiée de froid, ou endormie. Nous accueillons les collègues qui arrivent, et saluons ceux qui partent.

 

Le camion redémarre et s'éloigne laissant échapper une fumée grise et une odeur d'essence. C'est alors qu'un mouvement et un cri brisent le silence de la nature et le notre avec. Je ne parviens pas à distinguer l'origine de ce cri lorsqu'une marée d'hommes, de l'autre côté, s'abat sur la grille. La mer semble avoir déversé des centaines de clandestins . Certains n'ont même plus la force d'avancer et son traînés par les autres. Ils ont la rage de vaincre et sont bien décidés à passer cette nuit.

 

Pour mes collègues et moi, c'est la panique. Notre commandant chef sort de sa cabine, et assiste, comme nous, au spectacle avant de nous hurler des ordres que nous ne percevons pas. Tellement transits par le froid et la stupeur, nous ne pouvons plus faire aucun mouvement. D'un seul coup, tout s'accélère, je sors mon pistolet de son étui et tire au hasard dans l'étendue du ciel, espérant une réaction du côté de l'armée en face de nous. Rien. Nos balles semblent ne jamais avoir été tirées.

 

Nous sommes dépassés. De l'autre côté, tout semble avoir été parfaitement orchestré, et chacun sait ce qu'il a à faire. Du nôtre, c'est le chaos. Nous avons été formés pour ça, en temps normal nous aurions réagi avec professionnalisme. Mais cette vue d'horreur me prend aux tripes et mon cerveau se bloque. Le commandant chef l'ordonne, il faut tirer.

 

Seulement je ne me sens pas prêt. Je ne peux pas. Un bon nombre de clandestins parvient aux sommets de la grille. Et la situation prend une toute autre tournure. Il y règne comme une ambiance de folie. Chacun tente de passer au détriment de l'autre. Certains se retrouvent piétinés et jetés au sol. Plus personne n'est dans aucun camp désormais. C'est l'adrénaline qui nous fait bouger. D'un geste brusque, je braque au hasard mon pistolet sur la masse en face de moi, et tire.

 

C'est à ce moment précis que je sais. Je sais que je vais tuer des maris, des pères, des enfants et des amis. Je vais tuer des semblables. Mais les ordres sont les ordres et l'homme est devenu gibier. Je tire trois balles dans la foule. Elle atteignent trois clandestins, trois Hommes, trois Frères. C'est l'instinct de survie qui prime.

 

Nous avons bloqué les forces ennemies un bon bout de temps. Lorsque que tout s'est enfin calmé. Au bilan, la moitié des Hommes d'en face ont pu passer au détriment des leurs, la plupart des autres sont morts, par nos balles ou leurs semblables et nous sommes maintenant face au reste de l'armée des clandestins, qui est vaincue. Nous nous occupons du côté administratif, identifions les victimes et les survivants. Nous estimons le nombre qu'ils étaient au départ (environ cinq cent), et ceux qui se sont échappés (deux-cent cinquante). Ceux qui sont morts (soixante-quinze) et le reste qui est là, devant nous. Le regard perdu et dépité.

 

C'était de la pure folie. Et je prends enfin conscience que stopper ces personnes qui affluent par la mer de l'autre côté du continent, ne fait qu'accroitre leur rage et leur détermination. Je suis paralysé, par la peur et l'étonnement. Plus aucun de mes membres ne répond, un de mes collègues me tire par le bras et m'entraîne à l'intérieur.

 

Nous nous retrouvons à l'endroit que nous avions quitté trois heures plus tôt. A l'exception faite que le jour s'est pratiquement levé, et que la nuit dans son départ a enveloppé le froid dans son sombre manteau et l'a emmené avec elle. Mon service prend fin dans une demi-heure. Je me laisse tomber lourdement sur la chaise où j'étais assis. Rien ne semble avoir changé. Le temps s'est suspendu à l'intérieur. Nos cartes sont dans la même position que lorsque nous les avions balancées et une odeur de tabac froid émane de nos cigarettes, dont il ne reste que des mégots et des cendres.

 

Fradin Dorine 1A (L)

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Publié le 19 Avril 2013

 

Chère Maria,



Je t’écris pour t’annoncer mon départ imminent. Je pars. Où ? Je ne sais pas. Loin. De l’autre côté de la Méditerranée. Pourquoi ? Plusieurs raisons. Je me suis peut être trompé, garde côtes ce n’est pas fait pour moi. Je ne peux plus. Je ne veux plus. Voir ces innocents essayer désespérément de passer cette frontière, leurs yeux exprimant la déception la plus fatale seront gravés dans ma mémoire. Jamais je ne pourrai oublier leurs visages si tristes, si décomposés quand ils voient au loin les lumières de nos bateaux. Je ne veux plus être la cause de leur désespoir, je veux changer. Partir est la seule solution. Je souhaiterais tout oublier, recommencer une nouvelle vie. Je ne veux plus me tromper. Je pars pour me reconstruire, je veux passer de l’autre côté, changer de camp. Je veux me réveiller de ce cauchemar interminable. Qui sait ? Peut être que je vivrais heureux, ou bien peut être l’inverse, je vivrais péniblement sans personne à qui parler ni même Angelo, mais ce sera toujours moins pire que ma vie d’ici. Et puis je veux être sur d’avoir tout essayé. Cette lettre, je vais la signer, la poster, et ensuite, je partirai à l’assaut de cette mer. Sera-t-elle fatale pour moi, comme elle l’a fait pour ces nombreux clandestins ? Je n’ai rien à perdre. Je tente l’inconnu. Adieu.

SP.

 

Blandine Kervern 1A(L)

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