Mes fous de Jean-Pierre Martin

Publié le 8 Décembre 2020

Mes fous de Jean-Pierre Martin

Tourbillon dépressif de fous

Jean-Pierre Martin nous plonge avec ironie dans la vie et les songes mélancoliques d'hommes.

  A trop forte dose, l’empathie, tant vantée par les médias et les psys, a son revers : la sensibilité aux malheurs d’autrui. Sandor Novick en est outré. Sylvain, son médecin et ami, lui prescrit la fréquentation de gens joyeux et équilibrés, le visionnage de comédies et le recours aux petits plaisirs de l’existence. " Quand il m’a conseillé de ne regarder que des films drôles, moi qui aime surtout ceux Lars von Trier, et plus que tout autre Melancholia, j’ai pensé à ma tante Jade que je n’ai vue qu’une fois, dont on ne parlait jamais, elle m’avait emmené voir Marx Brothers, elle ne pouvait voir que ça ma tante Jade, des Marx Brothers, peu de temps avant de suicider ". Sandor, cadre apprécié dans son entreprise, au bout d’un certain temps n’a plus supporté  " les masques, simagrées, les sourires postiches, la mélancolie sous les poses " de cette armée de directeurs.

En arrêt maladie, il arpente la ville. Sur les chemins, il fait des rencontres, toutes différentes, mais toujours les mêmes, ses fous qui lui disent leur vérité, répétant à l’envi le temps comme " Dédé le fou de météo " ou encore lui parlant de leurs songes comme " Laetitia et ses visions étranges ". Il s’interroge " Est-ce que j’attire les fous, ou bien est-ce moi qui cherche leur compagnie ? ". Au fil du temps, nombreux sont ceux qu’il écoute et soutient comme il peut, toujours empathique, toujours sensible à leurs blessures. " Je côtoie des folies étrangères pour tenter d’approcher l’énigme Constance ". Parce qu’au milieu de tous ces fous, il y a Constance, sa fille, schizophrène, affectueuse et violente à chaque émotion différée, que ni lui, ni son ex-femme Ysé, ni les médecins ne parviennent à sortir de son chaos intérieur.

Ce roman m’a vraiment plu, car j’ai véritablement réussi à m’identifier au personnage. Le choix de mettre un adulte comme personnage principal est judicieux, même si un adolescent aurait pu être à sa place. Car cet homme d’une quarantaine d’années, père de famille, est dépassé par beaucoup d’événements et ne sait comment gérer certains sentiments ou certaines situations ; comme un adolescent, il recherche sa douleur à travers autrui et essaie de la résoudre par la même occasion. Nouvelles similitudes avec le comportement adolescent à la fin du roman, quand le personnage part vivre seul, loin de tout problème. Les ados ont tendances à se refermer sur eux-mêmes quand leurs problèmes deviennent ingérables. Voilà pourquoi j’ai apprécié cette lecture : même si le personnage est un homme adulte, je pense que n’importe quel humain peut se retrouver en lui. 

Ozvan

 

 

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